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Poèmes à lire

Les recueils de jeunesse (1935 et 1939)

La Fleur de sang, couverture (1935) La Rose antérieure, couverture (1939)






André Antonin, jeune instituteur









Un poème de La Rose antérieure
                                                                        (La Rose antérieure)




Les recueils de la maturité (1970-1977)




Pluriel du temps, couverture (1970)Pluriel du temps, gravure de Jean Carton (1970)



Lever de coeur

L'or vient du Ventoux
L'or bat Plus de stores
Le jour voit la flore
Monter de partout

Ciel je ne sais d'où
Battant sous les pores
Le coeur s'évapore
D'un sommeil si doux

Brouillard sur la tombe
Les rêves retombent
Dans un jour sans pli

Matin pour tout dire
Soudain qui s'étire
Du fond de l'oubli

Tu ris tu dis tout
Tu rêves encore
Tu dis les Açores
Le coeur de partout

Tu dis les atouts
De riz le phosphore
Le coeur-maître fore
Des puits n'importe où

Tu dis l'hécatombe
Des mots qui retombent
Des cieux dans ton lit

Où pour mieux décrire
Les oiseaux pâlis
Ta bouche aime rire





La Mort fond au matin, couverture (1973) La Mort fond au matin, litho. de Paul Collomb (1973)
                                                                                                                (Lithographie de Paul Collomb, 1973)



Le passé

Tout s'est éteint depuis sans cri
L'orage glisse de tes lèvres tremblantes
Tu restes
Ce que le vent souffle
De souvenir
Dans la stagnation des marais
Ce qui demeure
D'une belle eau qui coule sans se froisser
Quand les fenêtres s'éteignent
Ce qui s'allonge
Dans la chair refroidie
Quand on rentre
Un soir de novembre il fait noir
L'école a fermé ses portes
Soudain une odeur chaude de soupe qu'on voudrait manger
On entend battre les cuillers
Dehors un claquement dans le vide du coeur
Un insecte vient se heurter à la lampe
Dont la mémoire s'allume
Sur les ors des vieilles photographies
Où chacun voudrait pouvoir encore se reconnaître
Mais l'expérience est toujours difficile
Car on ne peut empêcher que ce qui fut
Vienne se confondre au fond du temps avec l'imaginaire
Dites ne serait-ce pas Pierre
Je vous demande bien pardon
Mais plutôt Paul
Ou Jacques
Ou un autre
Ou peut-être un de ceux
(Peut-être tous)
Avec qui tu aimas me confondre
La nuit chaque fois que tu jugeais bon de le faire
Dans le vertige d'un songe
Sous les parapets du regard
Ce fleuve où rompre la monotonie de la vie





Jour sans merci, couverture (1976)Jour sans merci, litho. de Guy Bardone (1976)



Gréement

    Des plus hauts sommets, minuit tombe à pic comme
un mensonge de lune blanche sur l'ombre des coeurs
roussis à gréer longtemps leur dimanche.
    Alors des profondeurs du ciel, s'entrouve
un immense feuillage d'oiseaux qu'on ne voit bientôt plus.
    Mais l'instant a suffi pour verser dans le coeur du
dormeur le souvenir d'autres qui furent.
    Immense volière à jamais blottie dans le silence,
vision sublime comme un coup de fusil que le poids
du songe fond en éclair !



Pierrots

    Comme du fond d'un puits où l'on continue à voir
briller les étoiles, le matin remonte de l'enfance plus
noir que la nuit.
    Car aujourd'hui, comprimé, il ne peut s'étendre qu'à
travers des rayons meurtris dans un grand incendie de brume.
    Des nuages de confettis morts pleuvent jusqu'au
soir où d'étranges pierrots, échappés de la fête, dans
une immense jachère de lèvres, attendent l'heure qui
les couvrira de cire, les violons de la nuit faisant cercle.





Derniers poèmes, couverture (1978)



Compartiment

On a joué toute sa vie à guichets fermés.
Mais à présent le temps pose son écriteau :
        saisons à vendre.
L'espacement des barreaux du ciel
Creuse la faim comme un jour sans cage
A qui cerne son sang
Dans les marais de sa jeunesse.
Sur des ponts d'aube on glisse en chemin de fer
Quand la fumée éteint le jour,
On croit rêver
Mais on roule sans cesser d'être mort
Dans une grande catastrophe d'épis rouges
        qui fond le ciel sur le ballast.
Les bas côtés ont fui le regard,
Des flammes y tracent à travers la portière
        un long trait d'hébétude.
En écoutant attentivement on perçoit
Dans le rythme assourdissant
Venu de très loin
Comme un écho de la générale
Qui se déchire
Tout au long d'un mur de vitesse
Et décélère
Quand on approche
La grande gare.

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